L'arrestation de Shimitsu

La porte de la salle du trône de Shimitsu s'ouvrit brusquement alors qu'il était posément occupé à ne rien faire.

Près de cinquante hommes firent irruption dans la pièce. Ils portainent des uniformes et des armures bleu nuit, et leurs armes étaient braquées sur Shimitsu. La milice.
Un des soldats s'avança vers Shimitsu. Il ne portait pas d'armes et son casque était plus ouvragé que les autres.

"Sergent de milice Onimushu. Monsieur Ama, au nom du Président je vous arrête. Veuillez nous suivre sans résister."

Le "clac clac" de cinquante fusils mitrailleurs qui s'enclenchent en même temps appuyèrent la phrase du sergent de milice.

"Je vous prie."

Shimitsu se rassit convenablement dans son trône et posa sa lime à ongles sur l'accoudoir avec nonchalance. Il gratifia les miliciens d'un regard à la fois hautain et émouvant (ouais : c'est l'Aura des Boss >.< ^^) et de pointer le doigt vers eux. Un doigt long et pâle, fin comme du papier.

"Hum. Et puis-je savoir pourquoi ? Personnellement, je n'ai rien à me reprocher. Mais si vous ne voulez vraiment pas repartir les mains vides, vous pouvez nous débarasser de notre père, en crise de démence depuis trois jours de suite..."

Shimitsu poussa un faible soupir très élégant et rajusta le col de son kimono.
Ce n'était pas vraiment son genre, de ne pas résister. Il le faisait à sa manière, c'était tout.

Le sergent de milice Onimushu sentait la sueur perler sous son casque et se répendre sur son front. Il crispa sa main gauche sur la crosse de son flingue, pendu à sa ceinture, dans son holster.

"O... Ordre direct du Président monsieur Ama. On en sait pas plus. Ne nous obligez pas à tirer."

Le sergent de milice Onimushu savait très bien que si Shimitsu décidait de résister ils n'auraient pas une seconde avant de mourir. Et il se dit que si un seul des cinquante hommes qui le suivait était au courant il se retrouverait très vite seul.

Shimitsu haussa un sourcil, en caressant du bout du doigt la poignée d'un sabre posé nonchalemment contre son trône. Précaution exigée par Shiro en son absence.

"Et le Président donne ses ordres directement aux miliciens maintenant ? Ca fait un moment que je n'ai pas eu affaire à lui, mais les moeurs étaient moins libérés, vraisemblablement..."

Son visage se fendit en un sourire provocateur. Ca le titillait de les suivre. En même temps, il attendait d'une minute à l'autre un coup de fil de Yukô et Yukari, histoire de savoir où en était leur mission. Du coup, il cherchait à gagner du temps.

Et puis ça l'amusait de voir ses types transpirer dans leurs beaux uniformes à cause de lui.

Onimushu n'avait pas prévu ça.

"Le... Le Président donne ses ordres directement quand il entend qu'ils soient fidèlement exécutés. Mon... Monsieur Ama... Veuillez nous suivre, s'il vous plaît..."

Le sergent de milice était de plus en plus mal à l'aise. Il jetait de petits coups d'oeil anxieux au sabre à côté du trône.

*Seigneur, faites qu'il ne l'utilise pas, je vous en prie, je veux survivre, Seigneur...*

Shimitsu s'amusait de plus en plus.

"Mais s'il veut réellement que je m'exécute, le Président a pourtant l'habitude de me contacter en personne. Il sait parfaitement que je n'aime pas le petit personnel."

Le Patriarche esquissa un sourire.
Onimushu avait un air très frustré, un air d'enfant de choeur qui sait qu'il a fait une bêtise.
Shimitsu se mit à le dévisager intésemment, en ayant l'air de vouloir le disséquer vivant pour découvrir ce qui clochait. Rien que pour faire croître son malaise. Si quelque chose clochait, il finirait normalement par le balancer tout seul.

Le sergent de milice se rasséréna un peu. Cette réponse entrait dans le cadre des réponses qu'il était prévu que Shimitsu fournisse.

"L'estime que vous portait le Président a récemment considérablement décru, c'est pourquoi il n'a pas jugé nécessaire de vous contacter personnellement."

Il respirait. Il respirait un peu mais c'était déja ça.

Shimitsu eut un sourire narquois.

"Je vous laisse m'expliquer les raisons de cette soudaine... baisse d'estime. Si je les jugent acceptables, je ferait peut-être le déplacement. Sinon, vous pourrez lui dire que j'attendrai qu'il me contacte de lui-même..."

Le Patriarche caressa le manche de son sabre avec un peu plus d'insistance. Mais le sourire ne quittait pas son visage radieux. En réalité, il aurait dû être tracassé par cette soi-disant "baisse d'estime" qui pourrait le mettre dans une situation délicate d'un point de vue socio-politique. Il s'en foutait royalement.
Onimushu avait un air trop peu sûr de lui pour que ce soit grave.

Le sergent de millice Onimushu commençait à stresser. Et l'autre malade qui caressait son méga couteau...

"Le Président n'a pas jugé nécessaire de vous faire parvenir ses raisons, pas plus qu'à nous d'ailleurs. Il nous a intimé de vous ramener jusqu'à lui, de gré ou de force. Monsieur Ama, ne nous obligez pas à ouvrir le feu s'il vous plaît. Même si je ne doute pas que vous en sortiriez parfaitement indemne, soyez sûr qu'il n'en ira pas de même pour votre luxueuse demeure. Veuillez coopérer s'il vous plaît."

Onilushu contractait maintenant intensément sa main sur la crosse de son automatique. Il sentait que ses nerfs menaçaient de le lâcher. Et si il déclanchait les hostilités, certes il bousillerait avec plaisir la baraque de ce noble prétentieux et givré, mais il crèverait, comme tous ses hommes. Il devenait primordial que Shimitsu daigne les suivre.

Mais le noble prétentieux et givré s'amusait plutôt de la situation. Il 'avait pas vraiment qu'elle s'arrête, à fortiori si cela devait exiger de lui qu'il bouge. Et puis, cet Onimushu était presque touchant, à triturer sa crosse d'automatique... Le sourire de Shimitsu s'étira encore un peu.

"Hum..."

L'argument de la demeure était de loin le meilleur qu'Onimushu avait donné, même si vu l'état des finances Kikon Ama, il n'en demeurait pas moins dérisoire.

"Admettons."

Shimitsu avait prononcé ce mot d'une voix claire, avec une assurance de chef d'état qui seyait étrangemment à ses quinze petits printemps.

"Je vous rejoindrez donc au Palais Présidentiel pour l'heure du dîner. En souhaitant que Monsieur Watanabe sache aussi bien recevoir que dans le temps..."

Onimushu commençait à se sentir rassuré. Ce n'était pas exactement ce qui était prévu, mais ça y ressemblait.

"Je crains que vous n'ayez pas compris monsieur Ama. Le Président ne vosu invite pas. Il vous arrête. Il a ordonné que vous veniez maintenant, et je crains que vous ne couriez grandmeent le risque d'être déçu par la qualité de son ... accueil. Vous êtes en état d'arrestation, et votre tête sera mise à prix dès ce soir si notre mission n'est pas menée à bien. Le Président nous a autorisé à vous signifier que vous ne devez qu'à l'estime passé qu'il avait pour vous de ne pas avoir directement reçu la visite d'un vrai tueur. Entre nous, je crois avoir entendu parler du Serpent."

Passer sur le terrain de la confidence, tenter une familiarisation avec le suspect. Augmenter les chances de réactions favorables. Garder la main crispée comme jamais sur la crosse rassurante et chaude. Histoire d'avoir le temps de tirer au moins un balle si ce malade s'énervait.

Shimitsu esquissa un petit rire. Et dire qu'il s'apprêtait à les suivre... Il fit un peu glisser son sabre hors du fourreau. A peine quelques centimètres de lame luisante qui renvoyait l'éclat du soleil sur le visage d'Onimushu.

"Bien sûr... Et vous vous êtes évidemment dit que si vous veniez m'annoncer ça, j'allais vous suivre gentiment..."

Il soupira. Avec un peu de condescendance.

"Ai-je au moins le droit de savoir ce que l'on me reproche ?"

Le Serpent... Hum... Ca avait une drôle d'odeur, cette histoire. Un sergent de milice n'était pas sensé avoir vent de ce genre d'ordre. Etrange. Et tout aussi étrange qu'il lâche cette information avec autant de facilité.

Onimushu commençait à se dire que l'effusion de sang devenait inévitable.

"Nous ne nous sommes rien dit du tout monsieur Ama. Nous ne faisons qu'obéir aux ordres. Et vosu aurez le droit de savoir ce qu'on vous reproche quand vous comparaîtrez, pour la bonne et simple raison que nous même ne le savons pas. Veuillez nous suivre sans opposer de résistance."

Le malade mental avait commencé à sortir son sabre. Il ne les suivrait pas. D'un geste discret, le sergent de milice fit sauter le fermoir de son holster.

Shimitsu haussa les sourcils.

"On dirait que le Président est devenu un peu plus utopiste..."

Le jeune homme sortit entièrement le sabre de son fourreau et fit jouer la lame sous la lumière. Puis, il fendit l'air dans un sifflement aigu et planta la lame dans le plancher.

"Mais je vais vous suivre, ne serait-ce que par curiosité."

Il fit un peu tourner la lame du sabre dans le sol et arracha un morceau de bois, puis la ressortit et la replaça dans son fourreau d'un geste nonchalant.

"En revanche, vous comprendrez évidemment que je ne me séparerez pas de mon arme avant de savoir précisemment ce qu'on me veut. Des fois que... Je trouve la raison un peu faible ?"

Onimushu sentit son coeur défaillir lorsque le taré fit jaillir son arme et sortit son automatique. Toutes les mitrailettes de ses hommes se braquèrent vers Shimitsu et furent armées en même temps. Puis l'autre ficha son arme dans son plancher et les muscles des miliciens se décrispèrent un tout petit peu en même temps. Quand Shimitsu parla à nouveau, Onimushu rangea son arme et ordonna à ses hommes de se mettre au repos d'un geste de la main.

"Vous êtes autorisé à garder votre arme. Cependant je tiens à vous prévenir qu'il existe une possibilité pour que l'on vous demande de vous en séparer à votre arrivée. Suivez nous maintenant s'il vous plaît monsieur Ama."

Cinq mitraillettes étaient toujours braquées sur Shimitsu et les miliciens commençaient à se placer en cercle autour de lui et Onimushu.

"Déplacement, formation de protection", murmura Onimushu à ses hommes, la main toujours rivée à la crosse de son arme.

Le pathétique mouvement d'unnité des mitraillettes brandies dans sa direction arracha un petit rire saccadé à Shimitsu. Celui-ci passa le fourreau de son sabre dans son obi et descendit les dernières marches qui le séparait d'Onimushu d'un pas un peu solennel, la main sur son sabre.

"Et bien je suppose qu'il est temps pour nous d'y aller..."

Shimitsu jeta un pett coup d'oeil derrière les miliciens.

"Hum... Permettez en revanche que je me déplace par mes propres moyens. Je vous suivrez en skoot. Je saurai encore trouver le palais présidentiel."

Il gratifia Onimushu d'un sourire chafouin. Il avait l'air nerveux, le pitit sergent, fallait le mettre à l'aise.

Les fusils s'armèrent à nouveau. Le visage d'Onimushu se crispa. Cette demande était parfaitement imprévue. Il devait improviser, et vite.

"Je suis désolé mais il m'est absolument impossible d'accéder à une telle requête."

Gagner du temps, faire des phrases longues, pour trouver une idée.

"Le Président a ordonné que vous soyez escortés en personne jusqu'à la cellule qu'il vous a réservé en attendant votre comparution devant Lui. De plus il a ordonné que tous vos biens exception faite de ceux que vous portiez sur vous vous soient confisqués jusqu'à nouvel ordre. Cela inclut votre véhicule. Je suis désolé mais nous irons à pied, ensemble monsieur Ama."

Onimushu n'était pas trop mécontant de sa tirade, il n'avait pas hésité. De plus l'histoire qu'il avait servie était assez crédible, et en accord avec les techniques employées par le Président Watanabe. Restait à savoir comment l'autre fou furieux allait l'accueillir...

Là, Shimitsu se sentait agacé.

"Saisir mes biens...? Dites-donc, j'aimerai vraiment savoir ce qu'il me veut, le Grand Patron, aujourd'hui. Parce que je trouve ça un peu gros. Et il est hors de question que je me farcisse la demi-lieue qui nous séparent du palais présidentiel à pattes sous prétexte que je dois être surveillé. Y'a suffisemment de skoots ici, vous en prennez si ça vous pète, mais merde, j'en ai ma claque de votre délire surréaliste."

Shimitsu soupira. Ok, il avait un peu foiré ses effets sur le niveau de langage, mais bon. Il trouvait l'histoire un peu grosse et flairait le gros entubage. Alors il aurait pas craché sur des précisions, dut-il les tirer d'une troupe de miliciens à l'agonie.

Onimushu déglutit très péniblement.

"Je suis... Sincèrement désolé monsieur Ama, mais c'est impossible. Peu d'entre nous savent piloter un tel engin. Il va être nécessaire de marcher."

La tension devenait réellelement palpable. Bon nombre d'armes étaient maintenant braquées sur Shimistsu. S'il ne se calmait pas, un génocide massif semblait tout à fait inévitable.

Shimitsu poussa un profond soupir.

"Vous êtes chiants, vous savez ?"

Il jeta un regard condescendant aux miliciens. Même pas fichus de piloter un skoot...

"Soit, je vous suivrez à pied. Mais je tiens à ce que vous compreniez à quel point vous êtes ridicules et insignifiants. Ma petite soeur de dix ans sait conduire un skoot. C'est enfantin."

Nouveau soupir, la main sur le sabre.

"Et le palais présidentiel est à presque trois kilomètres..."

Shimitsu s'approcha du lieutenant Onimushu et planta ses yeux gris métal sur lui.

"Vous avez des enfants ?" déclara-t-il d'un ton cynique, le sabre à demi-dégainé.

Onimushu ravala sa salive.

*Qu'est-ce que ça peut te foutre, espèce de taré ? Tu me tuerais pas si j'en avais ?*

Mais il savait que dire une chose pareille ne ferait que précipiter un carnage qui lui semblait de plus ne plus inévitable.

"Non, je n'en ai pas. J'estime que mon métier est trop dangereux pour fonder une famille. Croyez bien que nous sommes navrés de notre incompétence mr Ama."

Il hésita un instant et se pencha légèrement vers Shimitsu.

"Entre nous le budget qui est alloué à l'entraînement des milliciens reste assez limité..."

Il espérait vivement qu'une réflexion de ce genre détendrait un peu la situation.

Shimitsu se redressa assez brutalement et soupira d'un air hautain. Vu la crispation qui avait envahi le visage du milicien pendant une demi-seconde, il savait que sa petite réplique avait eu l'effet escompté. Mais il devait reconnaître ça à cet étrange sergent : il savait rester maître de lui-même.

"Hum... J'avais cru remarquer, effectivement, que l'attribution des budgets de Monsieur Watanabe n'était pas très équitable..." -sourire, assez franc, presque sincère cette fois-

"Bon, si on doit y aller à pieds, on est pas encore arrivé... Alors autant nous y mettre... A moins que... Une voiture, tout ce qu'il y a de plus banal, vous savez conduire, non ?"

Onimushu marqua un léger air de surprise.

"Euh, oui, moi je sais, mais il ne nous en a nullement été attribuée. De plus je ne connais pas de voiture apte à transporter trente deux personnes, et il est interdit à chacun d'entre nous de s'éloigner de vous..."

Shimitsu se frotta le front entre deux doigts.

"Vous êtes débile, ou vous faîtes juste vachement bien la comédie ? Un bus, c'est nouveau pour vous ? Vous savez, le truc, comme une voiture, mais en plus long..."

Il accompagna la parole du geste et écarta les deux mains comme s'il s'adressait à un enfant de trois ans. Ce sergent était d'un manque de logique affligeant. Il prit une voix haut-perchée et exécuta une mimique de vierge effarouchée.

"Oh mon dieu, mais nous n'avons pas de tels engins ici ?"

Reprennant sa voix normale : "Andouille ! Moi, j'en ai ! Alors vous me suivez au hangar sans faire d'histoires et vous vous essuyez les mains !"

Le lieutenant Onimushu se frotta l'arrière du front. Aïe. Ca cétait pas vraiment prévu.

"Euh... Bien monsieur Ama... Cela dit... Dans un environnement aussi exigu, vous comprendrez qu'il nous est impossible de vous laisser porter votre arme à la ceinture..."